Hadopi et les atteintes au droit d’auteur sur internet (2)

Dans ce second billet seront observés plus particulièrement les problèmes soulevés par les atteintes au droit d’auteur sur internet.

Les problèmes soulevés par les atteintes au droit d’auteur sur internet.

La coexistence des deux procédures.
Les dossiers plus importants ne seraient pas liés par traités par la HADOPI.
En effet, l’infraction de négligence caractérisée créée par les lois dites « HADOPI » est sanctionnée par une contravention de 5e classe (amende de 1 500€), que le juge peut accompagner par une suspension de la ligne internet.
Le délit de contrefaçon, quant à lui, est une peine d’emprisonnement de 3 ans et une amende de 300 000€. Ainsi, lorsque les ayants-droit ont connaissance de personnes portant de nombreuses atteintes au droit d’auteur, ils préfèrent passer par la voie judiciaire en saisissant le Parquet en contrefaçon. 1

La voie judiciaire pour délit de contrefaçon permettrait aux ayants-droit d’obtenir davantage de dommages-intérêts et permettrait d’avoir une compensation financière.
Le Courrier Picard mentionnait ainsi l’histoire d’une personne ayant téléchargé 18 films le même jour. Les ayants-droit ont décidé de passer par la voie judiciaire plutôt que par la procédure de HADOPI.
Il a été condamné en janvier 2013 par le Tribunal Correctionnel d’Amiens à 90 jours-amende à 5€, ainsi que 2 200€ de dommages-intérêts aux ayants-droit. 2
De nombreuses personnes estiment à tort qu’elles peuvent attendre les avertissements en provenance de HADOPI pour arrêter de télécharger via le peer-to-peer.

Il s’agit de deux procédures distinctes qui peuvent être utilisées toutes les deux par les ayants-droit.

La non-sécurisation de la ligne internet.
Il faut rappeler que les lois HADOPI sanctionnent l’infraction de négligence caractérisée, et non la contrefaçon d’une œuvre artistique (soit un téléchargement considéré comme illégal).
On peut ainsi être sanctionné pour ne pas avoir téléchargé soi-même une œuvre, mais pour avoir permis la mise à disposition de cette œuvre.

Le 13 septembre 2012 a eu lieu la première condamnation de l’infraction de négligence caractérisée au Tribunal de police de Belfort. Un artisan a été condamné pour ne pas avoir sécurisé sa ligne internet alors que sa compagne aurait téléchargé deux chansons de Rihanna. 3
Peu importe que ce soit lui ou sa compagne qui ait téléchargé les chansons : la ligne internet est à son nom, c’est donc lui qui doit être condamné.

Le premier problème posé par cette non-sécurisation de la ligne est que seules 2 chansons ont été téléchargées. Or, la procédure prévue pour HADOPI prévoit plusieurs avertissements devant mener à la condamnation de l’abonné.

Il a alors été considéré comme attentant au droit d’auteur en raison de la mise à disposition des fichiers. En effet, les logiciels de peer-to-peer permettent de télécharger des œuvres artistiques tout en envoyant en même temps des fichiers. Son adresse IP a ainsi été contrôlée à nouveau (environ 150 fois) par la société TMG pour avoir simplement laissé les fichiers téléchargés dans le même dossier (ce qui permet leur envoi par le logiciel de peer-to-peer), et non pour avoir téléchargé à nouveau une œuvre.
Une simple mise à disposition des œuvres par ce logiciel suffit à voir son adresse IP contrôlée par la société et à être condamné pour l’infraction de négligence caractérisée.

L’infraction de la négligence caractérisée consiste dans le fait, pour l’abonné, de « s’être abstenu sans motif légitime à mettre en place un moyen de sécurisation ou a manqué de diligence dans la mise en œuvre de ce moyen ».
Toute la question est de savoir à quoi correspond ce moyen de sécurisation permettant de prévenir le manquement à l’obligation.

L’élément matériel de cette infraction demeure à la charge du Parquet et de la HADOPI. Les preuves apportées par la société et collectées ensuite par la HADOPI ne correspondent qu’au délit de contrefaçon et non à l’infraction de négligence caractérisée.

Certes, il s’agira d’une présomption qui sera assez difficilement contestable.
Cependant, cette personne pourrait invoquer une mise en œuvre d’un moyen de sécurisation pour se dédouaner.
Ce sera alors le rôle du juge, dans son pouvoir souverain, de décider si la personne a manqué ou non de diligence dans la mise en œuvre d’un moyen de sécurisation d’Internet.
Certains auteurs estiment par exemple que « le parent qui décide de confisquer l’ordinateur de ses enfants qui téléchargent illégalement met en œuvre un moyen de sécurisation au sens de la contravention de négligence caractérisée ; ou l’abonné qui a donné à un tiers le code d’accès WIFI à son boitier de connexion et qui le modifie après que le tiers ait utilisé à des fins illicites son accès à internet ». 4

Un potentiel vice de forme.
Le second problème posé par les lois « HADOPI » correspond à la forme des courriers envoyés par la Haute Autorité.
La négligence caractérisée est constituée lorsque n’a pas été mis en place un moyen de sécurisation de l’accès à un service de communication au public en ligne, ou lorsque la personne a manqué de diligence dans la mise en œuvre de ce moyen.

L’article L331-25 du Code de propriété intellectuelle exige que dans les courriers envoyés par HADOPI, la recommandation contienne une « information sur l’existence de moyens de sécurisation permettant de prévenir les manquements à l’obligation définie à l’article L. 336-3 ».

Si cette information n’est pas contenue dans les courriers, il est possible que soit prononcé par le juge un vice de forme puisque des mentions obligatoires, exigées par la loi, seraient absentes.
Il semblerait en effet, selon la lettre-type (5) que HADOPI enverrait aux abonnés, que l’autorité ne fasse que rappeler le fait qu’on peut demander des informations sur les moyens de sécurisation au fournisseur d’accès : or, cette information sur l’existence de moyens de sécurisation serait nécessaire dans le courrier.
On pourrait ainsi considérer que la HADOPI n’exécute pas son obligation d’information sur l’existence de moyens de sécurisation en renvoyant l’explication de ces informations aux fournisseurs d’accès.

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